Clémence Gueucier : entraîneure équipe Espoirs Reichel Elite, Stade Français
Photographie de Clémence Gueucier utilisée avec l’autorisation du Stade Français.
Clémence/Compétence : la rime est facile !
Nous nous intéressons à Clémence Gueucier en sa qualité d’entraîneure de l’équipe Espoirs Reichel Elite 1 du Stade Français, en précisant que c’est le 3ème de l’entraîneure qui compte puisque la féminisation de la fonction à ce niveau de compétition masculine est récente (il y a le précédent de Gaëlle Mignot au MHR) et relève encore de l’exception. Elle admet notre curiosité, mais s’empresse d’émettre trois observations :
- L’important dans sa fonction n’est pas le genre mais la compétence.
- Elle prend toute sa place dans l’entraînement de son équipe au sein d’un staff composé et dirigé par le manager Boris Bouhraoua, qui valorise des fonctions et des personnalités complémentaires (entraîneurs, préparateurs physiques, kiné, analyste vidéo, dirigeants bénévoles) et qui compte une autre femme (Cécile, kiné).
- Sans prétendre à une connaissance exhaustive des petites avancées dans la féminisation de notre sport, elle mentionne le projet porté par Laura Di Muzio, présidente du Lille Métropole Rugby Club Villeneuvois, comme autre terrain possible d’investigation.
Le parcours de Clémence dans le rugby a pris racine à l’Université (STAPS) et a très vite basculé sur une dimension d’aventure humaine, avec l’essor du club de Bobigny (hommage amical rendu à ses deux coachs, Fabien Antonelli et Marc-Henri Kluger et un long bail de joueuse internationale de rugby avec l’équipe de France à 7 (2010/2018), qui lui permet presque de négliger son unique sélection à 15. Professeur des écoles en disponibilité, elle répond aux exigences de Pierre Camou sur le double projet, en s’engageant vers un DEJEPS « rugby », dont elle pense qu’il complète sa formation initiale de pédagogue. Elle enchaîne ensuite sur le DES et intègre la FFR, avec des responsabilités sur le pôle Espoirs, et les équipes de France féminines U20 à 15 et U18 à 7
Elle rejoint le Stade Français essentiellement pour l’envie réciproque de travailler avec Boris, sans négliger une recherche de légitimité dans sa fonction qui ne serait pas que fondée sur sa propre évolution dans le rugby féminin. Elle s’accorde avec Boris et les autres membres du Staff que nous avons rapidement croisés sur la prééminence de la compétence et de la recherche de performance dans leurs activités quotidiennes et sur l’affirmation selon laquelle le genre ne fait rien à l’affaire…. Clémence a bien perçu que sa première présentation aux joueurs en sa qualité d’entraîneure des ¾ a pu justifier un certain étonnement qui n’a connu aucun prolongement d’aucune sorte. De son côté Boris Bouhraoua, en bon manager, observe avec attention le fonctionnement de son groupe de joueurs et les comportements des individus. Il s’en trouve conforté dans sa conviction initiale : c’est la personnalité et la compétence qui font l’autorité de l’entraîneur(e)…Une préoccupation demeure : la gestion de l’intervention dans les vestiaires et le rapport à la nudité des corps (question de respect qui se pose aussi pour les hommes entraînant les groupes féminins, et vécue un peu différemment par les kiné). Elle est traitée empiriquement.
Clémence relativise, sans les effacer, les rares propos désobligeants proférés à son encontre par des supporters indélicats, qu’elle a identifiés majoritairement chez les plus âgés. Elle a aussi vécu le Seven à l’U ARENA comme un moment particulier, du fait de sa couverture télévisuelle et des spécificités du 7, moins maîtrisées par le grand public.
Dans la conversation, elle précise sans que nous le lui ayons demandé qu’elle n’est pas féministe. Dont acte. Qu’importe d’ailleurs, mais relevons qu’elle contribue un peu au constat de l’entraînante nonagénaire Michèle Perrot (2023 Le temps des féminismes) : « elles avancent sur tous les fronts, y compris dans les métiers « virils »….les formes de création réputées masculines »
Clémence vit l’instant présent et son avenir n’est pas tracé. Elle sait que des choix s’imposeront à elle assez vite. Le retour dans le métier d’enseignant a ses avantages. Mais son activité d’entraîneure est exaltante et offre encore une marge de progression importante. Elle connaît bien le milieu « rugby » et sait qu’il peut aussi ne pas toujours reproduire le confort dans lequel elle évolue actuellement. Elle évoque le « cocon » filé par Boris Bouhraoua autour de son staff…Son alter ego Rémi acquiesce. Il devra lui aussi choisir la bonne clé pour ouvrir son avenir. Femme, homme, même passion, mêmes problématiques….Et le rugby d’élite a bien des talents !